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Sea yoU

Sea yoU

Un bateau nommé DÉSIRS... Voyages, aventures, humeurs, voiles, récits et photos


LES MALDIVES (départ Sabang - traversée - le Rallye - humeurs)

Publié par Fabienne et Dominique sur 28 Février 2022, 16:25pm

LES MALDIVES (départ Sabang - traversée - le Rallye -  humeurs)

Il faut quand même que je vous raconte notre départ de Sabang, car cela vaut son pesant de cacahuètes.

 

Nous nous levons tôt pour cette dernière journée à Sabang mais aussi cette dernière journée en Indonésie..

 

Un marathon administratif nous attend.

Ce n’est pas moins de 5 services différents dans lesquels nous devons nous rendre, bien sûr éloignés les uns des autres, la « quarantine » ( service de santé), « l’imigrasi  », la « custom », le bureau du port et enfin le « harbour Master », plus cerise sur le « Sunday », comme disent les cousins du Québec, un test antigénique dans un Hôpital militaire.

 

Les administrations du monde entier, ont toute un point commun qui pourrait se résumer par,

“pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué”.

 

Nous savions qu’ici dans la province de Banda Aceh ils pouvaient être un peu « tatillon », mais là, mais là… mais là…., on dépasse l’entendement, c’est l’inefficacité portée au rang de grand art, combinée à de l’imbécilité institutionnelle sans limite. C’est François Pignon dans le “dîner de cons”… des graines de Champions…

LES MALDIVES (départ Sabang - traversée - le Rallye -  humeurs)

Commençons par le test… je sais que pour vous c’est maintenant un peu comme aller chercher le pain…

“Allo.. chéri quand tu rentres, n’oublie pas de passer faire un test… si tu ne veux pas manger et dormir dans le garage avec le chien… merci chéri…”

 

Pour nous cela reste exceptionnel et on aime bien qu’il y ait un peu de sens, de logique…

 

Alors se faire tester avant de quitter le pays et de partir 10 jours en mer, dans un endroit où il n’y a pas de Covid, et où on nous a rien demandé en arrivant… on a un peu de mal… mais bon… c’est très “tendance” en ce moment, alors on se plie, on ne dit rien… après tout cela nous servira peut être en arrivant aux Maldives…

 

Un infirmier en treillis nous chatouille donc les nasos, dans cet hôpital perché en haut de la ville où il ne semble pas y avoir de malades, les lits sont vides.

Une ribambelle de jeunes filles voilées expriment leur joie de vivre par des rires et notre test sera sans doute le plus gros travail de la journée. Nous attendons une bonne demi-heure nos résultats et la lettre qui les prouve.

LES MALDIVES (départ Sabang - traversée - le Rallye -  humeurs)

Nous retrouvons un Tuk tuk (genre de « side car » amélioré où on peut être 2 ou 3) et repartons vers les bureaux du port.

 

Là tout se passe bien, on leur doit notre droit d’amarrage sur leur bouée. Cela fait 675 000 roupies (env 40 euros)  qu’on leur paie en liquide. Je leur demande un reçu, un papier quelconque qui prouve que j’ai payé.. “ pas besoin… on informera directement le “harbour master”… me répondent’ils.

 

En 10mn tout est réglé.

 

Au suivant…

LES MALDIVES (départ Sabang - traversée - le Rallye -  humeurs)
LES MALDIVES (départ Sabang - traversée - le Rallye -  humeurs)

La quarantine”

 

On me demande des papiers que j’ai déjà donné en arrivant, ce que je leur explique gentiment.

 

Tout ce dégrade quand il me demande où est notre bateau…, qu’il va falloir le déplacer pour le rapprocher et qu’ils vont faire une inspection.

Il faut se rappeler que ces gars là sont du service de santé, pas des douanes, où là encore je pourrais comprendre. Qu’est ce qu’ils vont venir inspecter sur le bateau avant notre départ alors qu’ils ne sont pas venus à l’arrivée?

 

Là je commence à m’énerver, car je sais que cela veut dire au moins 2 heures pour tout ce binz qui n’a aucun sens, et on a encore 3 autres bureaux à voir, des courses à faire, le bateau à préparer… je leur explique que je ne peux pas déplacer mon bateau et que s’ils veulent l’inspecter je peux les emmener en dinghy. Ce qu’ils acceptent.

Ils ajoutent qu’il y a 20 000 roupies (1€20) à payer, OK, mais ils n’ont pas l’autorisation de prendre de l’argent ( mesures anti corruptions), ils ne prennent pas de cartes non plus et il faut aller payer à la banque et revenir avec le reçu…

 

Alors là le capitaine Haddock qui sommeille en moi se réveille brutalement et je dis avec véhémence à ces “moules à gaufres” ce que je pense de toutes ces conneries.

 

On lit dans leur yeux foncés un mélange de surprise et de gêne. Ils n’ont pas l’habitude qu’on exprime son mécontentement de cette manière.

Généralement on voit dans les blogs qu’en Indonesie il faut rester calme avec les administrations, j’ai expérimenté le contraire plusieurs fois avec un résultat pas trop mauvais, les choses se sont débloquées, une solution a été « vite » trouvée….

 

C’est à deux qu’ils viennent dans l’annexe pour l’inspection de Sea You… Normal, ils s’emmerdent, alors une petite virée sur un bateau ça passe le temps et remplit la journée…

Il faut 20 minutes pour y arriver car ils sont lourds les bougres et le mouillage est loin.

 

Nous arrivons au bateau, ils s’installent dans le cockpit et me demandent s’ils peuvent voir les médicaments du bord.

Gigantesque est mon étonnement, mais je leur présente une des 4 boîtes que nous avons à bord dans laquelle il y a les antibios et anti-inflammatoires.

Un des gars prends un paquet de cachets attachés par un élastique et me dit: 

« La date de validité est expirée, je vais devoir les emmener »

«  mille millions de mille sabords…. Tonnerre de Brest…» Haddock est de retour…

« moi vivant, aucun de ces médicaments ne quittera le bord… » ce n’est pas deux Bachibousouks   d’opérette à qui on pincerait le nez qu’il en sortirait encore du lait, qui vont décider de ce que l’on peut avoir dans notre trousse médicale.

 

Et ils ont dû sentir que là, ils étaient allés trop loin et que rien ne me ferait céder sur mes médocs qui même périmés, peuvent nous sauver au milieu de l’océan. Ou peut être la fumée qui me sortait des oreilles les a convaincus..

 

 

« Ok ok… on voulait juste vous dire que celui là était périmé, pour que vous le sachiez, on vous les laisse, on vous les laisse… »

 

Et VOILÀ… l’inspection est terminée… ils ne sont même pas descendus dans le carré, rien, ils n’ont rien fait… sauf m’emmerder pour une boîte de médoc…

et nous voilà reparti vers la terre, 20mn de dinghy, et que je te prends des photos et des vidéos et on rigole…

Quand je vous disais que c’était pour passer le temps… à deux en plus… si on avait eu un dinghy plus grand tout le service serait venu…

 

Pour se faire pardonner de toutes leurs bêtises, l’un des deux emmène Fab à la banque sur son scooter et utilisera sa fonction pour la faire passer devant les 20 personnes qui attendaient.. je sais c’est pas sympa, mais pour Fab c’était une question de survie, sinon on l’internait…

Ensuite comme il était 11h30, ils nous ont déposé devant les bureaux de « l’imigrasi  ».

 

Au suivant…

le panneau devant l'Imigrasi

le panneau devant l'Imigrasi

Alors là, tout autre ambiance, ici il y a du budget… ils ont les moyens les bougres.

 

Une jeune fille voilée qui porte une écharpe de Miss nous ouvre la porte, et nous fait entrer dans un hall d’accueil qui semble très récent.

 

Au comptoir une autre jeune fille et deux jeunes hommes s’adressent à nous avec un grand sourire. Puis ils nous proposent du thé, que nous acceptons, et la jeune fille ajoute à chacun une petite assiette avec deux gâteaux.

 

On peut pas dire, ils ont bossé leur stage « accueil du client »…

Nous expliquons notre départ prochain en bateau, et hop hop un autre homme nous prend nos Passeports… sans rien nous demander d’autre…

 

« ils ont l’air d’être efficace ici »… nous disons nous en coeur..

Et les deux jeunes garçons que nous pensions en stage découverte de 3ème, sont en fait bien plus vieux, 26 et 23 ans.

 

 

Ils nous assaillent de questions sur notre voyage, ce que nous avons fait en Indonésie, où nous vivons, la France….on ne les arrête plus…

 

Oui c’est sympa les gars, justement on avait pas grand chose à faire aujourd’hui, et on se disait même ce matin, « on ferait bien une petite conférence « Connaissance du monde » »…

 

Il nous demande même de faire une petite séquence vidéo, pour un montage qu’ils présenteront pour l’anniversaire du bureau.

Et nous voilà en train de souhaiter un « joyeux anniversaire « l’imigrasi » devant une caméra moi en Français et Fab en indonésien.

 

Au bout de trois quart d’heure, vu qu’il est déjà 12h15, on en est à: « quels sont les restos sympas pour aller manger ce midi ».

Tout le monde vient nous donner son adresse, et que je te Google map des restos à tous les endroits de la ville…

 

Quand enfin arrive LE PAPIER et nos passeports avec le TAMPON de sortie …

Une simple feuille A4 avec 5,6 lignes et ce fameux tampon.

Il leur a fallu près d’une heure pour sortir ÇA… alors qu’il n’y a personne et qu’ils sont 37 à « travailler » là.

Chapeau…

 

Au suivant…

LES MALDIVES (départ Sabang - traversée - le Rallye -  humeurs)

Mus d’une irrésistible foi envers cette journée de « merde », nous courons à la « custom » ( la douane) au cas, hautement improbable, où un noble serviteur de cette honorable administration pourrait nous faire nos papiers.

 

Un jeune homme, qui parle bien anglais, habillé genre uniforme mais sans la veste, nous dit « désolé, on est vendredi et ils sont tous partis prier à la mosquée. Ils ne seront pas de retour avant 14h. »

 

 

Ok… on va exploiter les adresses de restos de « l’imigrasi  », sachons rebondir…

 

On choisit celui où le Président indonésien avait mangé lors de sa visite à Sabang…. On tape haut quand même…

Bon une chose est certaine, on a pas les mêmes présidents.

 

On a mangé, exactement la même chose que dans les autres restos d’ici, peut être un « chouille » mieux préparé ….

 

On met du riz dans son assiette, il y a une vingtaine de plats différents, mais qui sont tous les mêmes dans tous les restaurants, on remplit son assiette et le tour est joué.

C’est en quelque sorte un self à l’indonésienne

On paie l’assiette et voilà… il n’y a bien sûr pas de bière, pas de vin, c’est musulman, pas de dessert non plus, là je ne sais pas pourquoi…

 

Retour à la douane, vers 13h50 , on ne sait jamais, il y en a peut être un qui a dit ses prières plus vite que les autres… non…

On voit les gens arrivés passé 14 h… il y a pas de raison non plus qu’ils fassent mieux que les français…

Cela bouge, on vient nous demander un papier, je ne sais plus lequel il y en a tellement… je leur dis bien que c’est pour le bateau Sea yoU, qui quitte le territoire.

 

On nous demande de patienter, normal…

on compte jusqu’à 7 personnes qui travaillent sur notre dossier, pour un cargo ils doivent être au moins deux cents… Attention, ça va y aller ce coup ci… on a affaire à des vrais pros…

 

il y a des aquariums partout pour calmer les gens

 

En fait il y en a un sur l’ordinateur et 6 autour qui le regardent taper.

Une demi-heure s’écoule, ils passent des coups de téléphone, ils emmènent  un papier je ne sais où, puis reviennent…

 

Enfin un gars s’avance vers moi avec un document qu’il me demande de signer, c’est bon on  touche au but…

Il me montre où je dois signer, et!!!!  aux dernières nouvelles je ne m’appelle pas Jérôme….

 

Aahhhhhh!!!!!! Les vedettes… ils ont fait les papiers pour un autre bateau de français qui est dans la baie et qui lui ne part pas, il vient d’arriver….

 

Alors là!!!  Franchement!!!! à 7 en plus… c’est Allah qui se venge pour ce que j’ai dit sur leur religion, c’est pas possible autrement… il y a un complot, big pharma veut que je fasse ma troisième dose de vaccin et pourquoi pas 4 ou 5 tant qu’on y est … ( c’est très à la mode ça aussi)

 

Et Hop une autre demi-heure pour tout recommencer.

 

Au suivant....

encore un aquarium!!!

encore un aquarium!!!

Maintenant, c’est le « Harbour Master », il est 15h15.

 

Fab l’a croisé ce matin pendant que j’animais une sortie détente sur Sea yoU pour la « quarantine ».

Elle lui a expliqué, la situation, il a compati , et a ajouté, ne vous en faite pas, nous, on prépare les papiers, ça ira vite…

C’est là que je comprends que la notion « vite » n’a pas le même sens dans tous les pays…

 

Le gars qui fait le papier n’est pas le « harbour master », c’est un collaborateur.

Rassurez-vous tout de suite rien n’était préparé…

 

Donc on s’assoie devant son bureau, il vérifie que l’on a bien fait tous les autres papiers chez ses collègues fonctionnaires, et il commence l’œuvre de sa journée, un numéro de cirque de jonglage de papiers.

 

Il prend un papier, le regarde, le retourne, le lit, le met dans une imprimante, le ressort, le copie, le relie, tape sur son ordi, le reprend, le remet dans l’imprimante… suspens… il passe un coup de téléphone… on ne comprend rien, c’est du javanais, mais on entend « Sea yoU »… yes… il n’appelle pas sa femme pour savoir ce qu’il y aura à manger ce soir… il reprend le papier et ça recommence, il le relie 10 fois… on est au bord du fou rire nerveux… il part avec ce foutu papier… 10 mn… putain mais il va jamais revenir…. Ie revoilà, je dois signer et  mettre mon tampon

 

YESSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSS on l’a…. La CLEARANCE de sortie….Il est 16 h

 

On doit encore faire nos courses de légumes, de fruits, remplir 4 bidons d’eau et les faire amener au dinghy, dépenser tous les sous indonésiens qu’il nous reste, retourner sur Sea yoU, tout ranger, préparer le bateau, envoyer les derniers courriers, dont cette clearance à notre agent aux Maldives…

Et avec tout cela….. on a oublié les bananes…

 

Mais le pire dans tout cela, c’est qu’ils sont tous très gentils, ils sont super adorables, on peut même pas leur en vouloir…

LES MALDIVES (départ Sabang - traversée - le Rallye -  humeurs)

Samedi 15 janvier 2022

 

Le vent souffle à l’extérieur, il fait siffler les haubans et onduler la mer. Il souffle aussi dans le carré, car tous les capots sont ouverts et il apporte l’agréable fraîcheur relative du petit matin. Enfin il souffle à l’intérieur de notre être tout entier, car l’envie de partir fait frissonner notre âme.

 

Depuis 3 jours, cet air propulseur de vaisseaux véliques est assez soutenu, entre 15 et 25nds,  et cela doit continuer aujourd’hui et pendant encore quelques jours sur notre route vers ces îles de l’océan indien, Les Maldives.

Comme nous serons franchement au portant ( vent qui nous pousse), la navigation sera plutôt agréable, dans tous les cas, moins fracassante qu’avec le vent de face.

 

Je ne vais pas vous raconter une fois de plus notre navigation jour par jour pendant ce passage entre Sabang et Uligan.

 

Le raconteur d’aventures sur les océans, est un peu comme l’humoriste, il doit se renouveler, sinon il lasse. Je n’ai pas encore eu de plaintes, mais je préfère prendre les devants.

 

Toutes les traversées sont bien sûr différentes, mais elles se ressemblent aussi un peu.

Surtout pour celui qui en lit le récit.

 

J’ai peur de prendre le risque de te perdre, oh très cher lecteur. Il est déjà miraculeux, dans ce monde où le temps devient une denrée de plus en plus rare, que tu daignes sacrifier un peu du tien pour lire ma modeste prose.

 

Quand nous acceptons toutes les tentations de notre monde hyperconnecté, notre temps s’épuise comme une batterie trop sollicitée.

Nous sommes tous devenus des « junkies » des smartphones, tablettes et autres joujoux reliés à la « toile », ou plutôt au « filet »  (net). Un filet qui nous a attrapé comme des poissons amorphes  dans ses mailles et nous a emprisonné avec notre approbation dans un monde de plus en plus virtuel.

 

Nous consultons tous nos engins de communications comme des zombies, mus par de nouveaux réflexes de désirs illusoires de ne rien manquer de ce qui se passe dans notre monde.

Mais le plus inquiétant, c’est que l’on ne se sent plus obligé de s’investir physiquement et personnellement dans les débats, pour des causes, et même de plus en plus dans nos relations intimes avec les autres…

 

C’est la peur qui a gagné son combat…

 

Dans peu de temps, ce seront nos avatars qui se rencontreront, dragueront et même feront l’amour dans les « métavers », ces univers virtuels ressemblant au nôtre dans lesquels nous pourront vivre par procuration en ayant l’impression d’être à l’abri, en sécurité dans notre fauteuil.

Plus besoin d’affronter le regard de l’autre. On pense s’exonérer de la peur du jugement alors que cela ne fait que révéler notre lâcheté d’affronter la vie.

 

Nous démissionnons face à nos peurs que nous n’osons plus affronter, et en même temps nous en générons de nouvelles. Le Covid est un bel exemple de peurs surmultipliées médiatiquement, et par les réseaux sociaux, totalement irrationnelles, hystériques quand on regarde simplement les chiffres donnés officiellement, il n’y a pas besoin d’en inventer…

Et cela va renforcer encore un peu plus la domination du virtuel, où l’on sera physiquement protégé des virus. Mais pas des virus informatiques….

 

Avant, quand presque tout le monde fumait, il était fréquent que pour se donner une contenance, pour alléger une gène face aux autres, que l’on prenne une cigarette pour se donner un peu de courage, maintenant on prend son portable, demain la rencontre se fera dans un univers virtuel et on enverra son avatar..

 

Il est vrai que c’est meilleur pour nos poumons, mais pas pour notre psyché.

Il a fallu presque 50 ans pour que l’on prenne conscience des dangers du tabac sur notre santé pulmonaire, il en faudra peut être autant pour voir ceux des smartphones sur notre santé psychique et sociale.

 

Nous avons la chance en grandes traversées, où il n’y a plus accès à aucun réseau, de faire une cure de désintoxication forcée, de réapprendre à vivre sans smartphone, tablette, ordinateur connectés qui nous donne l’illusion de ne pas être seul, qui nous enfument le cerveau de quantité d’informations inutiles.

 

Il y a peu d’endroit sur cette terre où l’on peut encore faire cette expérience extraordinaire de se retrouver face à soi-même, coupé du réseau et des névroses des humains, peut être en haut de certaines montagnes de l’Himalaya, sur les pôles…

En tout cas depuis que nous sommes partis nous n’avons pas trouvé un seul endroit habité où les  autochtones n’avaient pas de smartphones… c’est quand même très fort en à peine 20 ans d’existence…

 

Ce sevrage, cette expérience d’un monde qui n’existe plus, permet de voir que c’est encore possible de vivre sans ce rectangle de haute technologie.

Mais aussi que ce n’est pas si facile que cela, il faut l’avouer. Les réflexes d’envoyer un message, de chercher une info sur le net sont bien ancrés dans nos vies. Ils sont sur « un fond de bonne tenue » comme disent les marins, et pour certains on peut même dire que l’ancre est coincée au fond.

 

Et je confesse que ce n’est pas l’entière vérité, nous sommes quand même encore un peu relié à ce monde puisque nous allons chercher notre météo avec le téléphone satellite au lieu d’observer le ciel et les nuages…

 

« Dom, tu fais quoi là… tu t’égares… ils s’en foutent les gens de tout cela…ils veulent s’échapper de leur quotidien et toi tu leur remets la tête dedans… tu vas les noyer… » me dit une petite voix bienveillante qui me rappelle que je dois reprendre mon cap, et faire attention à la dérive qui m’entraîne dans des zones « non hydrographiées ».

E.T. n'a pas pu rentrer à la maison, il a vieilli et il est ici....

E.T. n'a pas pu rentrer à la maison, il a vieilli et il est ici....

Je vais donc résumer ces 10 jours de traversée et en extraire la substantifique moelle.

 

Les 4 premiers jours, comme prévu, Eole nous gratifie d’un bon vent comme je l’ai dit plus haut. Nous tangonons le génois ( la voile est maintenue sur le côté par un tangon), et souvent nous pouvons mettre la trinquette en ciseaux.

 

Sea yoU file à toute allure (pour nous) sur l’océan indien nord que nous découvrons. Bon je ne vais pas vous mentir, c’est toujours de l’eau et des vagues…

 

Il faut dire qu’enfin nous avons un bon courant favorable ( entre 1 et 2,5 nds).

Quel contraste avec les quelques 1500mn que nous avons parcourus depuis Bali où nous avons pratiquement toujours eu le vent et le courant contre nous.

 

Mais le plus appréciable encore, c’est l’absence de gros cumulonimbus orageux qui se forment en fin d’après midi. Pendant près de 3 mois il ne s’est pas passé une nuit sans que l’on voit de près ou de loin des éclairs inquiétants qui déchirent le ciel.

Et bien, c’est fini, nous devons être suffisamment Nord, pour que ce stress s’arrête enfin.

 

A l’aube du cinquième jour, après avoir traversé tout le sud de la baie du Bengal, nous nous approchons de Sri Lanka, Ceylan de son ancien nom…

Le vent, dévié par cette île immense, tourne légèrement, le courant aussi, et la mer devient très très agitée. Nous sommes ballottés dans tous les sens.

 

Cela nous prend une journée de navigation dans ce « shaker », pour finalement arriver brutalement dans la zone de dévente. Sri Lanka fait maintenant office de bouclier protecteur…

mais nous on a besoin du vent… rendez le nous…

 

Plus moyen d’avancer… nous mettons le moteur pour la nuit afin de sortir de cette pétole dans laquelle nous sommes englués.

 

En théorie, après être sortie de cette protection ceylanaise, les vents coincés entre l’Inde et le Sri Lanka sont sensés s’accélérer, souffler fort et nous propulser vers les Maldives.

 

Mais à cause du réchauffement climatique, du Covid, des extra-terrestres, de big pharma ou de Vladimir Poutine…  il en est tout autrement.. le vent souffle au Nord Ouest et nous l’avons dans la gueule… encore une fois.  C’était trop beau…

 

Nous sommes donc contraints de tirer des bords et de jouer avec les moindres changements de direction d’éole pour gagner du cap. Deux grands bords suffisent pour rejoindre la plus au nord des îles Maldives.

Nous aurons quand même fait environ 80 mn supplémentaires. Pas grand chose au regard d’une traversée de 10 jours, mais on aime pas beaucoup faire de la route en plus et ça plombe notre moyenne qui était très correcte.

 

 

Quand la lumière naissante fait éclater la profonde noirceur d’un ciel abandonné par la lune, nous découvrons au loin les premiers îlots de l’atoll de IHAVANDHIPPOLHU. Encore une vingtaine de miles et c’est Uligan, la petite île où nous nous rendons qui se dévoile progressivement à l’horizon.

 

Comme toujours nous avons adapté notre vitesse des 2 derniers jours afin d’arriver en milieu de matinée pour bien voir les obstacles éventuels.

 

Vers 10 h, nous pénétrons dans cet atoll qui contrairement à ceux des Tuamotu n’est pas fermé par une barrière de corail, l’eau passe librement entre chacune des petites îles. Il y a  donc moins de courant pour entrer, mais on est beaucoup moins protégé de la houle de l’océan qui elle aussi entre facilement.

 

Et c’est précisément ce qu’elle fait par un passage au Nord Ouest, ondulant le lagon de vagues qui viennent s’écraser sur le plateau corallien qui entoure l’île.

LES MALDIVES (départ Sabang - traversée - le Rallye -  humeurs)

Nous sommes le seul voilier et nous cherchons un endroit où jeter l’ancre. Des indications données sur internet et par notre agent font état d’une zone de sable, mais celle ci est vraiment proche de là où les vagues déferlent.

 

Je m’en approche quand même très doucement, Fab est à l’avant et tente de voir le fond, mais la surface est agitée. J’ai un œil sur ma carte et un autre devant… nous faisons un premier passage… je n’aime pas du tout ce coin… je donne l’ordre à Fab de jeter l’ancre, mais comme à chaque fois que l’ancre descend, le sondeur « saute » et me donne une profondeur erronée de 3,4 m. Je demande à Fab de remonter l’ancre car je ne sais pas quelle est la profondeur.

 

Nous faisons un nouveau passage, sur ma carte nous sommes entre deux plateaux coralliens, donc normalement je dois avoir du fond. Fab me hurle il y a des patates.. mon sondeur passe brutalement de 4m à 2,8.. 2,6…2,4.., je tente une marche arrière timide, je regarde ma carte, pas d’obstacle là où je suis…je remets donc un peu de gaz en avant et on entend un « scratch » qui résonne dans toute la coque… on vient de riper sur un morceau de corail…

 

« Putain de bordel de merde… c’est quoi cet endroit… »

Je n’ai plus le choix, je fais confiance à mon instinct et continue doucement vers du bleu plus profond… tout mon corps est à l’écoute, crispé, tendu, guettant le moindre bruit, cherchant désespérément du regard dans l’eau l’espoir de quelques centimètres supplémentaires...

Fab me hurle «  par là, par là… ».

Je l’écoute et doucement la profondeur augmente, nous sortons de ce cauchemar.

 

Nous ne faisons pas de nouveau passage… je trouve plus au large un platier corallien qui lui est à 7m de profondeur et nous jetons l’ancre, il n’y a pas de sable, mais ce n’est pas non plus la première fois que nous mouillons sur du corail.

 

J’enlève mon T-shirt, enfile mes palmes et mon masque et plonge vérifier l’ancre et mon bulbe de quille.

 

L’ancre est posée à l’envers sur un fond très accidenté de corail mort grisâtre. En perdant la vie, le corail perd ses couleurs et son tranchant, il se polit, il devient lisse…  Je plonge et la remets à l’endroit en la coinçant entre deux excroissances.

 

Je ne suis pas inquiet pour la tenue… avec la chaîne que nous avons mis, il y a toujours quelque chose qui nous retiendra…

 

Sur le bulbe il y a juste une éraflure de 20 cm sur le côté et l’anti fouling est parti. Cela confirme que nous avons seulement frotté sur cet animal devenu minéral.

 

Mais il est certain je n’ai aucune envie de renouveler cette expérience traumatisante même si cette fois ci elle est sans conséquence.

Le punch d'arrivée qui effacera la fatigue sur nos visages

Le punch d'arrivée qui effacera la fatigue sur nos visages

Les gardes côtes nous contactent pour nous saluer et nous prévenir qu’un autre bateau doit arriver. Ils viendront plus tard pour contrôler les deux en même temps. Cela nous laisse un peu de répit pour ranger Sea yoU, déjeuner tranquillement et faire une sieste.

 

C’est justement pendant que je suis en plein vol au dessus du pays des songes, admirant les décors fantasmagoriques de mon inconscient bouillonnant d’imagination, qu’il me semble entendre des voix. Elles n’ont pas l’air d’appartenir à ce monde merveilleux et étrange qui défile dans ma tête, mais il me faut quand même quelques instants pour le comprendre. Je m’extirpe avec grand peine de cet univers tellement extraordinaire qu’il me coûte de le quitter.

 

Je sors nu à l’extérieur pour en avoir le cœur net car je ne suis pas encore certain de la réalité de ce que perçoivent mes sens. Je me retrouve face à un petit bateau à moteur avec 5 personnes de noir vêtu jusqu’au masque qui me font des signes… il y a deux ans encore, j’aurais levé les bras en hurlant «  attaque de pirates »…

 

Je redescends pour couvrir conventionnellement ces parties que l’on dit intimes, parce qu’elles nous procurent un immense plaisir que l’on assume plus depuis que la religion les a marquées du sceau du diable et que l’on cache sans même savoir pourquoi.

 

J’essaie de réveiller Fab qui elle, est toujours dans les bras de Morphée. Des bras tellement serrés qu’il faut que je crie et la secoue pour qu’elle daigne ouvrir un œil hébété.

Ils sont tous déjà à bord quand elle descend du lit se demandant encore ce qui arrive.

 

Les formalités sont assez rapides car notre agent a bien fait son boulot et tout est prêt, il n’y a plus qu’à signer. Ne regardant aucun des papiers par lassitude, je me demande quand même si je ne suis pas en train de signer mon arrêt de mort, ou la vente de Fab à un harem du golfe persique pour quelques sacs de sable… on verra bien!!!

LES MALDIVES (départ Sabang - traversée - le Rallye -  humeurs)

En fin d’après midi nous nous rendons au village pour retrouver notre agent Asad. Un garçon relativement jeune habillé comme un « trader » de la city, pantalon droit noir tombant sur des mocassins brillants, petite chemise cintrée, noire également, sans aucun signe de froissage, cheveux parfaitement peignés, tenus par un gel « fort » qui signifie que par force 7 de vent pas un poil ne bouge… IPhone, montre qui me semble être une IWatch, porte document design… on ne s’attend pas à un tel niveau de sophistication sur cette petite île d’à peine 500 habitants, sans voiture et où les rues sont en sable et les maisons modestes.

 

 

Il nous emmène dans l’unique « café » de l’île où l’on peut boire une boisson sans alcool bien sûr, manger quelques plats locaux de qualité très moyenne et même des frites, surgelées, mais quand on est en manque comme un belge de Tournai pourrait l’être après 24 h sans « friture », tout est bon.

 

 

C’est un endroit plutôt agréable avec quelques tables qui a un petit charme local difficile à définir. Le lieu est ombragé par un arbre imposant qui étale au dessus de nos têtes des branches protectrices

qui cassent l’ardeur des rayons du soleil.

 

 

 

Il n’y a que des hommes qui sont attablés.

Ici, en terre musulmane intégriste, on ne se réunit qu’entre « couilles » comme disait mon fils quand il était ado.

 

Ce n’est vraiment pas une religion pour moi, pas plus que les autres d’ailleurs…

Les seules femmes qui peuvent s’y montrer sont celles qui sont sur des bateaux, et comme nous sommes le seul bateau… Fab ne se fera pas de copines aujourd’hui…

 

Asad nous offre un verre de bienvenue, mais également notre repas du soir, une délicate attention de sa part.

 

Dès le lendemain, d’autres bateaux arrivent de Langkawi, de Phuket, de Gale.

Uligan est en quelque sorte un point de ralliement des voiliers avant de se lancer dans la grande traversée.

Celle qui mènera au saint graal du marin qui navigue dans cette partie du monde. Le passage qui nous fera retrouver ces bonnes vieilles terres d’occident où il fait bien meilleur vivre que ce qu’en pense beaucoup de ses habitants, le canal de Suez.

LES MALDIVES (départ Sabang - traversée - le Rallye -  humeurs)

Lui et son assistant Hammadhu, sont d’une rare efficacité. Dés le lendemain, les pleins de diesel sont faits, et surtout il m’a trouvé un boulon que jamais je n’aurais pensé trouver ici, et même dans à peu près les quatre cinquièmes des endroits où nous nous sommes arrêtés.

 

 

En arrivant j’ai constaté que ce fameux boulon en inox avait cassé net sur le « davier » qui soutient le « bout dehors » de notre « gennaker ».

 

La pression de celui ci sous voile déployée, combinée à une mauvaise tension du « dyneema » sensé compenser celle ci, et l’inox casse encore une fois comme du verre. ( je sais c’est un peu technique, mais je ne pense pas non plus que vous souhaitiez que j’en fasse deux pages).

 

Bref j’avais un plan B au cas où, mais le plan A me ravit encore plus.

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Asad nous fait une proposition qui n’a rien d’indécente mais néanmoins alléchante.

 

Il soutient le premier Rallye nautique des Maldives qui devait voir le jour en 2021 et fut reporté en 2022 pour cause d’hystérie planétaire.

 

Il nous raconte une histoire improbable de sponsor qui lui permet de nous proposer d’y participer gratuitement autant de temps que l’on veut. Tout sera gratuit, et nous profiterons de l’ensemble des prestations, repas, barbecues, soirées, cadeaux…

 

De plus on est pas obligé de rester jusqu’à la fin et on peut partir quand on veut..

 

 

Ce rallye est normalement facturé 1000$, pour une durée d’une vingtaine de jours, voilà qui a de quoi mettre en émoi notre côté juif écossais vivant en Auvergne ou juif auvergnat vivant en Ecosse… Tout étant dans tout, on a tous caché au plus profond de nous mêmes, ou à la surface, ce côté « ne pas rater une bonne affaire », et si en plus on mange gratis!!!!

 

En fait le 5 février , c’est l’inauguration officielle du rallye en grande pompe, avec une brochette d’officiels à faire griller sous le soleil de l’île d’Horafushi où auront lieu les réjouissances.

(ministre du tourisme, maires, délégués trucmuche et présidents machinchose..)

 

Il n’y a pas beaucoup de participants, peut être 3 ou 4.

 

En effet, les tourdumondistes, ou « circumnavigators » perpétuant une tradition pas encore millénaire de voyages autour de la planète sur les océans, sont un peu perdus face à la folie de ceux de la terre.

 

Ils pensent plus à ramener leur bateau en Méditerranée ou en Atlantique, en attendant la fin des grandes complications administratives et sanitaires qui prévalent en ce moment, qu’à se balader dans les îles Maldives et manquer une bonne fenêtre pour traverser la mer d’Arabie puis la mer rouge.

 

Un grand nombre de marins s’est retrouvé bloqué, sans pouvoir retourner sur leur bateau et ils n’ont plus envie de revivre cela.

 

Donc pour la presse, le ministre, et la futur promo qu’ils vont faire dans les salons nautiques européens, il faut du monde…

Et comme nous sommes une quinzaine de bateaux en attente d’un départ imminent pour Djibouti,  la proposition est faite à chacun.

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Après consultation des prévisions, il apparaît qu’une bonne fenêtre météo s’ouvre le 8 février sur l’horizon toujours flamboyant de notre voyage. Nous participerons donc les 4,5,6 et 7, pour les cérémonies d’ouverture et leurs agapes ainsi que pour les activités des deux premières journées.

 

Tout le monde est content, les organisateurs parce qu’ils auront de quoi faire des images et montrer au ministre qu’il peut continuer à investir dans le projet, et nous car c’est toujours agréable d’être conviés à une fête entre marins, et de découvrir un peu de la culture des Maldives.

 

Et cela d’autant plus que l’on a même pas à bouger notre bateau, qui est quand même en mode « préparation d’une grande traversée », car des navettes de transport vont venir nous chercher pour nous emmener sur tous les sites… le bonheur… les premières journées du rallye se déroulant sur des îles proches d’Uligan.

 

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Nous avons donc un programme aussi chargé qu’un porte-conteneurs.

 

Néanmoins, quand le soleil commence à se rapprocher de son zénith, dans un ciel presque sans nuage et que ses rayons de lumière bleutée transpercent le cristal liquide qui nous entoure, nous enfilons nos palmes et masque, pour sonder la beauté aquatique des fonds de ces îles si réputées pour la plongée.

 

Si les coraux vivants sont un peu décevants, là où nous plongeons, en terme de couleur et de quantité, il y a énormément de poissons, des bancs entiers qui se baladent innocemment et s’écartent gentiment à notre passage par courtoisie plus que par peur.

 

La faune est d’une richesse incroyable dans ces îles jusqu’à présent peu exploitées par la pêche.

 

Il n’est pas rare de voir passer des dauphins près de Sea you quand notre étoile passe derrière l’horizon pour briller de l’autre côté.

 

Une raie manta de très grande envergure est venue nous voir ce matin, je me suis mis à l’eau pour l’accompagner dans son ballet gracieux… mais à côté d’elle j’avais l’air d’un tronc d’arbre qui se prend pour une sirène…

 

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Asad organise ce soir de son coté un repas pour ses clients de bateau.

 

Nous nous retrouvons tous sur la pointe sud de l’île que nous accostons avec nos dinghies qui seront traînés sur la plage.

 

 

Le sable a la couleur et la délicatesse de la semoule extrafine du couscous marocain. Des centaines de coquillages différents, habités par des Bernard l’ermite se baladent énergiquement sur ce terrain de jeu rarement visité, se demandant certainement quelle est la cause de cette invasion soudaine.

 

Aux heures du midi, les eaux qui entourent cette plage de rêve, prennent d’innombrables nuances cristallines de bleu qui font surgir dans nos yeux, des émotions d’enfant devant la beauté pure.

 

Au couchant, le moment de notre rendez-vous, la mer est plus sombre, mais le sable s’accapare les teintes rougeoyantes de celui qui tire sa révérence. Il n’est pas le seul, nos peaux elles-mêmes, déjà brunies par le soleil et les embruns, ont, à ce moment de la journée, la couleur du bronzage parfait. Celui qui donne la sensation d’être beau, l’envie que tout soit encore possible, qui nous allége illusoirement du poids d’une bonne dizaine d’années.

 

Le moment est tellement intense que l’envie de passer en mode « réalité augmentée » est à son comble.

 

Nos habitudes d’occidentaux non soumis à la dictature d’une religion refont surface. Une bonne bière fraîche, un cocktail, un verre de vin ou un petit pétard selon les envies de chacun auraient complété sans ombrage ces délicieux instants de communion avec la nature et les autres équipages participants aux repas.

 

Mais Allah ne veut pas qu’on s’amuse… encore un qui a décidé que notre passage sur terre devait être un "calvaire". On a le droit de souffrir de la vie mais pas d’en jouir, et encore plus si on est une femme.

 

 

Justement, ce sont des femmes à la tenue toujours très austère, tout en noir et voilées qui ont cuisiné des plats traditionnels Maldiviens.

 

Elles restent à l’écart du groupe et seuls les hommes qui font partie de l’équipe d’Asad viennent discuter avec nous.

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Comment peut-on encore à notre époque traiter les femmes comme cela??

Comment toutes ces foutaises religieuses peuvent elles encore résister au bons sens ordinaire, à l’intelligence de base, à l’évolution de la conscience…

 

Et c’est un être profondément spirituel qui vous dit cela.

La spiritualité est la recherche en soi de la connaissance de notre véritable nature. Toute cette connaissance est en nous et chacun peut la retrouver seul s’il le souhaite.

Les religions c’est totalement l’inverse. Basées sur des croyances, une soi-disant vérité détenue par quelques uns et l’acceptation des dogmes sans condition, elles refusent et rejettent la recherche personnelle de la connaissance qui bien sûr conduiraient à leur mort.

 

Et nos féministes??? Qu’est ce qu’elles foutent nos féministes?? On les entend pas beaucoup sur le sujet de la libération de la femme musulmane opprimée par l’homme et l’Islam… peut être qu’elles se trompent de combat en attaquant chez nous les quelques mâles encore un peu macho qui font des blagues douteuses, ou essaient de les séduire maladroitement. Il y a bien pire dans ce monde!!!

 

Auraient elles peur de se faire traiter d’Islamophobe???

 

 

L’arme fatale de ceux qui veulent tuer tout débat d’idées. On est pas d’accord avec les décisions stupides du gouvernement face à l’hystérie planétaire du Covid, on est complotiste, on est critique sur la vision rétrograde et hégémoniste des musulmans, on est islamophobe…

 

Y en a marre de se laisser enfermer dans des « genres » par ces dictateurs de la pensée unique!!!

 

C’était ma minute « indignation »… tant pis pour les féministes et les religieux… qui ne me liront peut être plus… ( il ne restera bientôt plus beaucoup de lecteurs…)

 

Je sais qu’il y en a qui doivent se dire, mais qu’est-ce que cela vient foutre dans un blog de tourdumondiste à la voile?

 

Tout espace d’expression peut être et doit être l’occasion de dire ce que l’on pense.

 

Et puis cela va plus loin, l’immensité et le dépouillement de l’océan, où l’on passe des jours et des jours isolés entre le ciel et la mer est propice à l’émergence de la pensée, à la réflexion sur soi-même et le monde dans lequel nous vivons.

 

L’ondulation des vagues à l’infini tout autour de nous, est semblable à un cerveau géant auquel on peut se relier et qui nous aide à percevoir des angles de vue différents. Un dialogue intérieur se crée entre le marin qui ouvre sa conscience et la mer.

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Mais revenons à ces îles des Maldives perdues dans l’océan indien..

 

Il y a quand même une grosse différence entre l’islam d’Indonésie et celui des Maldives.

En Indonésie les contacts étaient toujours extrêmement chaleureux, souriants, joyeux, les femmes nous abordaient sans problème, c’était toujours un plaisir de se balader au milieu de ces gens, même à Sabang qui a pourtant adopté la Charia depuis le tsunami de 2004.

 

Ici tout est dur, lourd, les gens ne nous adressent pas la parole, ils sont suspicieux, ils ont tous l’air triste et d’avoir peur des mécréants…

 

Ici aussi c’est la loi religieuse islamique qui dirige le pays. Mais c’est un petit état faible, et son grand frère l’Arabie saoudite les aide… et vous devinez la contre partie… un islam dur et austère.

 

Mais ils ont quand même autorisé un tourisme haut de gamme avec des resorts hyper luxes sur des îles isolées sans contact avec les populations locales. Et bien sûr les principaux investisseurs et clients viennent des pays du golfe.

 

Un marin suédois rencontré au rallye me disait qu’il était venu dans les années 90 sur cette même île de Uligan, et que cela n’avait rien à voir avec aujourd’hui. Aucune femme ne portait le voile, les enfants, filles et garçons jouaient ensemble et se baignaient nus dans la mer…

Bel exemple de régression.

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Le lancement de ce premier rallye est il un premier signe de changement, une légère ouverture sur  l’extérieur ?

 

En tout cas on peut dire qu’ils ont mis le paquet pour cette première édition.

Nous retournons le soir du 4 février sur cette plage magnifique où nous étions la veille, pour l’inscription officielle au rallye.

 

Cette fois, en descendant de notre dinghy, des jeunes filles, toujours vêtues de la tête au pied, nous attendent avec des serviettes fraîches pour nous rafraîchir, (comme sur Air France et d’autres compagnies j’imagine) et une coco verte comme punch d’accueil.

 


Puis en nous inscrivant ils remettent à chacun un sac avec T-shirt, stylo, agenda, casquette, magnettes… et une carte SIM d’une valeur de 50$ avec 100 gigas d’internet + communication et SMS.  ( de quoi faire une orgie d’internet)

 

 

Ce sont deux navettes rapides qui viennent nous chercher le lendemain matin dans le petit port de Uligan pour nous emmener sur l’île en face Horafushi.

 

vedette rapide pour nos déplacements

 

De nouveau serviettes fraîches très agréables, un nouveau sac rempli de cadeaux, et on nous emmène sur le site de la cérémonie d’ouverture.

 

Tous les véhicules de l’île ont été réquisitionnés pour nous transporter, car sur cette île un peu plus grande qu’Uligan, il y a quelques voitures ( on se demande bien pourquoi? La seule route qui puisse être appelée par ce nom, est celle qui mène à l’aéroport fraîchement construit et même pas encore ouvert, et ne fait pas 1 km de long.)

 

A notre descente de la future « voiturette » de l’aéroport, qui est la première à arriver, on envoie la musique, et des enfants en haie d’honneur nous attendent pour nous remettre un nouveau cadeau, une magnifique composition artisanale, réalisée à partir des éléments séchés qui composent les énormes grappes de fleurs de cocotier.

Si l’intention est charmante, pas facile de garder cela sur un voilier d’autant que c’est une par personne.

 

 

Le site choisi pour la cérémonie est sur une plage en bordure d’un lagon extraordinaire dont le bleu clair éblouissant se reflète sur toutes les surfaces brillantes.

 

Une petite scène a été dressée devant laquelle des habitants en costume traditionnel miment des tâches traditionnelles anciennes.

 

 

Des tables et des chaises joliment décorées, façon « mariage occidental » sont placées à l’ombre des arbres.

Enfin de longs chariots de buffet avec leurs grands plats à couvercle en inox, certainement empruntés à un « resort » prestigieux, laisse à penser qu’ils ont aussi assuré côté cuisine et que nous serons bien nourris.

 

 

Comble du raffinement, des nattes de palmes de coco tressées sont disposées sur la plage avec un petit panneau de bois qui porte le nom de chaque bateau. Deux serviettes y sont disposées pour notre confort…

 

 

Peut être un peu « too much » pour des marins habitués à la précarité des longues traversées océaniques. Mais bon, on se laisse faire… c’est bien agréable et cela change un peu…

 

Suit une rafale de discours, très ennuyeux qui heureusement ne fera pas de victimes…

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Avant le repas, nous repartons tous avec le même cortège de voitures disparates, pour aller planter un arbre à l’aéroport flambant neuf.

 

 

Puis on nous emmène visiter la grande école moderne de l’île. Dans la cour tous les enseignants nous accueillent avec un nouveau cadeau, une bouteille joliment décorée avec des coquillages à l’intérieur. Ils nous offrent une boisson à base de banane verte et de cardamome, très agréable en goût mais indescriptible.

 

L’heure du repas arrive enfin. Des plats locaux et occidentaux, qui ne feront jamais ombrage à la cuisine de chez nous, nous sont proposés à volonté. La quantité compense la qualité, mais un marin, fusse-t-il français sait s’adapter à tout même à la nourriture.

 

 

Jusqu’à 17 h tout le monde est libre de se balader et de profiter de la plage.

 

Puis on nous emmène sur le port pour embarquer à bord de deux bateaux sur lesquels nous allons participer à une partie de pêche.

 

 

Les thons sautent partout autour du bateau, ils connaissent bien l’endroit ces pêcheurs pour nous emmener directement au milieu d’un banc. Il suffit de mettre une traîne avec une plume pour en attraper un en quelques secondes.

 

 

 

Au retour, la plage a totalement changé d’ambiance. Une savante décoration lumineuse habille le sable, les arbres, la scène et même le ciel… là encore on sent la « resort touch », car tout ceci n’a vraiment rien de « local ».

 

 

Une légère bourrasque de vent transporte jusqu’à nos glandes olfactives une douce odeur de langoustes, poissons et poulpes grillés qui se dorent tranquillement sur un barbecue géant.

 

 

 

Un groupe de musiciens et de danseurs font leur show avec des démonstrations à la fois traditionnelles et modernes pendant que nous dégustons méticuleusement les victuailles qui nous sont offertes.

Ha!!! si on avait un petit vin pour accompagner tout cela….

 

 

Comme dit notre ami Irlandais Marc, que nous n’avions pas revu depuis Fidji et qui vient d’arriver, « 21 h c’est l’heure du marin… après il vaut plus rien ».

La navette du retour nous attend au port, et au moment de monter à bord, des jeunes femmes nous donnent à chacun un cadeau de départ, un bois tourné peint à la main…

 

Mais que va-t-on faire de tout cela sur Sea yoU??? On ne peut pas les jeter, ni les donner ici à Uligan, ils ont fait tant d’effort pour nous accueillir et nous faire plaisir!!  mais on ne peut pas non plus tout garder… on essayera d’en donner en Afrique… ( n’y voyez rien de méprisant ou de colonialiste)

 

 

Nous ferons encore une sortie avec le rallye le 6 sur deux autres îles , mais le 7 nous sommes dans les starting-blocks pour partir demain traverser la mer d’Arabie, le trop célèbre golfe d’Aden, et faire une escale à Djibouti. Une traversée de presque 1900 mn.

 

 

Bon vent à tous...

 

Sea you sooN

 

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Conseil aux marinS

 

 

De Sabang à Uligan

 

Bien choisir sa fenêtre météo et ne pas hésiter à partir avec plus de 20nds de portant. Il faut avoir au moins 4 à 5 jours de vents prévus. Nous avons rencontré ensuite des bateaux qui avaient fait plus de 1000mn au moteur en étant parti de Langawi ou Phuket quelque jours après nous.

 

La dévente de Sri Lanka semble incontournable, ensuite tout dépendra de la direction du vent, nous avons dû tirer deux grands bords, d’autres ont pu le faire sur un seul bord.

 

Uligan

 

Le mouillage n’est pas aussi évident que souvent mentionné sur le net, ou même la carte qu’Asad  nous avait envoyée et que l’on trouve aussi sur un guide à télécharger «  MR John », surtout si l’on a plus de 2 m de tirant d’eau.

 

Ce mouillage conseillé sur du sable est très proche du « reef », et pour y accéder on passe au dessus d’un haut fond de corail non mentionné sur les cartes qui fait moins de 2,10 m à marée basse. ( nous avons ripé dessus heureusement sans le heurter)

WP de l’endroit à éviter: 07 05 002 N - 072 55 146 E

 

 

Notre mouillage à 6, 7 m de fond sur une élévation de corail mort fut correct avec 50 m de chaîne et des bouées pour soulever la chaîne sur les 20 derniers mètres, pour ne pas l’entendre riper sur le corail.

Notre mouillage: 07 04 970 N - 072 55 070 E

 

Pour les formalités, notre Agent est Asad avec son assistant Hammadu. Ils sont extrêmement sympathiques et efficaces pour tout ce dont vous avez besoin. Eau, diesel, essence, argent local, ravitaillement, problèmes techniques…. On peut tout leur demander…

 

Dans le village il y a une petite épicerie et deux autres plus modestes. Pas toujours facile de trouver fruits et légumes… le mieux est de demander quand arrive le bateau, et d’être là le soir même. Ce jour là nous avons pu avoir des grenades, du raisin, des kiwis… que nous n’avons plus jamais revus après.

 

Il y a une boulangerie où l’on peut faire des commandes avant de partir. Il peut faire des « baguettes » et des « croissants » mais seuls des anglo-saxons et des français en vraie crise de manque pourront les trouver acceptables. ( mes amis anglo-saxons me pardonneront ce lieu commun à leur encontre.. it is a joke…)

 

Le café fait d’agréables boissons genre citronnades ou thé glacé dans un lieu bien ombragé. On peut aussi y manger mais c’est un peu comme les croissants à la boulangerie….

 

A part cela, il n’y a pas grand chose à voir dans le village, en 2 h on en a fait le tour.

Sur l’île d’Horuafushi en face il y a un peu plus de possibilités de ravitaillement. Mieux vaut y aller en navette ( voir avec Asad) qu’avec votre bateau car les mouillages sont quasi inexistants.

Le petit port peut peut-être être accueillir 2 ou 3 voiliers, mais avec un accostage avec ancre devant.

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O
ca fait rever
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J
Un régal ce récit . Merci
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R
Pas d'inquiétude, je prends toujours autant de plaisir à te lire. Et vive les digressions "hors champs maritimes", c'est devenu tellement rare. Je ne connais pas la situation actuelle mais pour le golfe d'Aden, à l'époque(2005), nous avions éteint tous les feux et allumé le radar en permanence. A chaque écho, on s'en écartait. Soyez attentifs au renforcement du vent au passage de Bab el Mandeb pour entrer en mer Rouge.<br /> Bons vents.
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F
Merci.. pour l’instant nous sommes bloqués à Port Suakin pour cause de vents forts du N. Nous aurons peut être une fenêtre de 3 jours pour faire une petite remontée et nouvelle attente… trop éprouvant pour le matériel et l’équipage de faire face à ces vents de plus de 20nds dans une mer ultra courte qui lève immédiatement . J’en profite pour écrire la suite…
C
À chaque nouvel épisode le plaisir augmente !....<br /> Quelle patience pour décrire ce labyrinthe de formalités stupides... non, vous ne fatiguez pas le fidèle lecteur que je suis. <br /> De tout coeur avec la profondeur de vos réflexions..
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